Le CCS au Svalbard (Spitzberg) – traversée depuis Trondheim

Dans ce volet du compte rendu du projet «Svalbard 2017», Patrick Weibel fournit un aperçu du voyage à bord du Cruising Swiss V au départ de Trondheim jusqu’au Svalbard. Il souligne certains aspects de cette expédition particulière et les explique de manière détaillée.

 

Itinéraire

Lors de l’élaboration du programme des croisières 2017, l’un des objectifs a été de pouvoir accomplir le voyage jusqu’au Svalbard avec les membres d’équipage participant au projet et de ne pas encombrer les autres croisières du Cruising Swiss V avec de longues étapes. Il en a résulté un trajet d’au moins 1'000 milles nautiques pour la première croisière, ce qui correspond à la distance directe depuis Trondheim jusqu’à Longyearbyen.

En fixant le départ à Trondheim, les 500 premiers milles nautiques jusqu’à la région de Lofoten-Tromsö pouvaient être accomplis, au cas où cela s’avérait nécessaire, dans des eaux relativement protégées «à l’abri des îles». En outre, cette route dispose d’une certaine infrastructure, qui peut s’avérer utile en cas de problèmes techniques avec le bateau.

 

Notre voyage jusqu’au Svalbard a ainsi été divisé en trois étapes:

a. Trajet jusqu’à la région de Lofoten-Tromsö

b. Traversée de la mer de Norvège jusqu’au Svalbard avec possibilité de faire une halte à Byörnöya (l’île aux Ours)

c. Excursions locales au Svalbard

 

Afin de garantir la sécurité de la croisière-aller et d’avoir assez de temps au Svalbard, nous sommes partis sur le principe d’effectuer un voyage sûr et rapide.

 

Au final, nous sommes arrivés à Trondheim au départ de la Suisse avec un jour et demi de retard en raison du décalage d’un vol. Un autre retard a été occasionné en raison des heures d’ouverture du commerçant d’armes, qui nous ont contraints à attendre le lundi pour pouvoir aller chercher nos armes et munitions. Nous avons quitté Trondheim le lundi 26 juin 2017 dans l’après-midi et avons atteint Svolvaer sur les îles Lofoten le vendredi 30 juin 2017 dans la matinée. Lors de ce trajet, nous avons eu droit à un jour avec un vent idéal, un jour de calme plat et un jour avec un vent correct du nord (vent contraire) au milieu – ce qui a déjà eu pour cause de mettre à mal notre bilan voile/moteur. En chemin, nous nous sommes accordé, outre les habituels temps libres, trois escales de six heures au mouillage afin de garantir le repos nécessaire.

 

Problèmes techniques

Nous avons heureusement pu résoudre nous-mêmes en route tous les problèmes techniques à bord du navire, ce qui nous a évité de passer des jours supplémentaires à terre. La recharge de la batterie du moteur nous a posé quelques soucis. L’alarme de ce dernier sonnait régulièrement. Après quelques recherches, nous sommes tombés sur une boîte à fusible endommagée, qui avait probablement fondu à cause d’une résistance de contact excessive et qui empêchait donc l’alternateur de recharger la batterie. En sa qualité d’électricien et d’ingénieur, Martin Zünd est parvenu à résoudre avec beaucoup d’engagement et de détermination non seulement ce problème, mais une quantité d’autres soucis techniques à bord du Cruising Swiss V. Sans lui, nous aurions subi un autre retard et/ou aurions dû accepter de sacrifier un peu de confort. Merci beaucoup, Martin.

 

A peine arrivés à Svolvaer, une analyse météorologique du programme Weather4D récemment installé sur le bateau annonçait la formation d’une configuration favorable des vents en bordure d’une zone uniforme de basse pression qui se déplaçait depuis les Lofoten jusqu’au Svalbard. Et effectivement, au cours des quatre jours suivants, des vents du nord-est et d’est soufflant entre 12 et 25 nœuds nous ont poussé depuis les Lofoten jusqu’au Svalbard. La dépression s’est déplacée plus ou moins à notre vitesse sur la mer de Norvège. Le mardi 4 juillet 2017 vers midi, nous étions déjà arrivés à destination. Après avoir atteint Hornsund à l’extrémité sud de l’archipel du Svalbard, nous avions encore une semaine et demie à disposition afin découvrir sous le soleil de minuit cette magnifique région recouverte de glaces. Un débarquement que nous avons dignement célébré.

 

Communication

Il n’y a aucune couverture de réseau mobile dans la mer de Norvège et dans d’autres zones plus éloignées du Svalbard. Afin de pouvoir communiquer avec le monde extérieur, le CCS a installé sur le Cruising Swiss V un téléphone portable Iridium avec Access Point et antenne extérieure, une radio ondes courtes avec un modem Pactor, ainsi qu’un NAVTEX. Nous avons privilégié la technologie Iridium pour la collecte d’informations. L’Access Point local diffuse un signal WLAN local sur le bateau, grâce auquel on peut connecter au système des ordinateurs portables, des tablettes et des smartphones, et envoyer et recevoir des e-mails. Il faut cependant veiller à restreindre le volume des données (aucune pièce jointe aux e-mails). Le transfert d’un fichier GRIB d’environ 20 kilobytes nécessite environ trois minutes. Grâce aux e-mails quotidiens standardisés de query@saildocs.com, nous avons été en mesure de recevoir des fichiers GRIB par le biais du logiciel Iridium installé sur nos systèmes. Les visualiseurs de fichiers GRIB installés sur nos ordinateurs affichaient les analyses graphiques de ces derniers.

Les analyses fournies par le logiciel Weather4D mis à disposition par le CCS sur un iPad se sont révélées extrêmement utiles pour la traversée. Ce logiciel analyse une combinaison de données GRIB et de données polaires du bateau, et génère des propositions d’itinéraires et d’heures de départ, qui tiennent également compte de certaines instructions (p. ex. forces de vent maximales souhaitées). Ces propositions nous ont permis à Svolvaer de détecter de manière précise les conditions météo idéales pour nous aux confins de la zone de basse pression.

 

Les sites internet suivants contiennent de plus amples informations sur les services mentionnés:

 

Naviguer dans les glaces
Situé à la lisière des glaces polaires du nord, le Svalbard est recouvert à environ 60 pour cent de glace. Ce n’est que grâce au Gulf Stream – qui termine sa route dans cette région – qu’une grande partie de la côte ouest reste épargnée par les glaces pendant une longue période en été. En fonction des vagues de froid ou du vent poussant de la glace qui s’est détachée des glaciers, il arrive régulièrement que les eaux ne puissent pas être naviguées, ou seulement en partie. Des cartes des glaces sont donc nécessaires pour assurer la sécurité de la navigation. Grâce à l’abonnement à Wetterwelt d’un équipier, nous avons été en mesure de recevoir quotidiennement ces dernières dans notre boîte à mails du bateau (Iridium).

Les vents d’est dominant entre fin juin et début juillet ont poussé de la glace qui s’était détachée d’un glacier jusque dans les fjords et dans la zone côtière du Svalbard occidental. En route, nous devions donc compter sur le fait qu’une couche de glace recouvrant jusqu’à dix pour cent de la surface serait présente dans les dix derniers milles nautiques ainsi que dans les sounds et les fjords de la région. Personne d’entre nous n’avait déjà navigué dans les glaces. C’est donc avec une prudence toute particulière que nous nous sommes approchés des côtes. Nous tenions à pénétrer lentement dans cette zone, et avec une bonne visibilité et un temps clément. Expérience faite, nous savons désormais que cela s’avère tout à fait possible. Il est relativement facile d’esquiver les fragments de banquise isolés et, si cela n’est pas possible, on peut pousser de côté les plus petits morceaux de glace à l’aide d’une gaffe ou avec la coque du bateau, sans que cela occasionne des dégâts.

 

Faune et flore

C’est déjà lors de notre traversée depuis les îles Lofoten que nous avons fait la rencontre du monde animal arctique. En route, nous avons eu la chance d’entendre le souffle des baleines et d’admirer tout un groupe de dauphins bondissant à côté du Cruising Swiss V. Les mouettes nous accompagnaient inlassablement, même au loin de la terre ferme ou des îles. A peine arrivés au Bellsund, des renards polaires s’amusaient tout près de nous et ne s’enfuyaient pas lorsque nous nous approchions d’eux. Dans cette même baie, nous avons également rencontré une famille entière de rennes, qui, pas du tout timides, s’approchaient volontiers de nous. Il s’agissait de rennes du Svalbard, une espèce un peu plus petite. Nous avons également rencontré des macareux, surtout sur l’eau. Ces derniers, ne semblant pas savoir qu’ils plongent mieux qu’ils ne volent, tentaient de nous fuir en faisant des décollages ratés, jusqu’à ce que, épuisés, ils retombent dans l’eau. Nous sommes parfois également tombés sur des vagues à l’apparence étrange, qui se sont révélées être au final des têtes de phoques et de morses.

 

La seule chose à laquelle nous n’avons malheureusement pas eu droit est une rencontre avec un ours polaire, malgré le fait que nous y étions toujours bien préparés. En cas d’éventuel face à face avec ces magnifiques bêtes, nous aurions aussi pu compter sur l’aide des habitants de Ny-Ålesund, qui laissent les portes de toutes les maisons constamment ouvertes afin que les touristes puissent, en cas de nécessité, se mettre à l’abri.

 

En voyant cette contrée de loin, on ne croirait pas que des plantes poussent au Svalbard. Aucun arbre à l’horizon. Juste des glaciers, des roches et de la neige à perte de vue. Et pourtant, en y regardant de plus près, on trouve souvent de la mousse sur les rochers ainsi que de minuscules fleurs qui poussent sporadiquement. Et apparemment en quantité suffisante pour que les animaux puissent se nourrir – en tout cas pour les rennes qui, durant tout le temps que nous les observons, passent leur temps à dévorer la mousse et l’herbe rare. Fait étonnant: il y a en tout 130 types de plantes à fleurs au Svalbard.

 

Dispositif de sécurité pour les sorties à terre
En fonction de la situation des glaces, le Svalbard est directement relié aux glaces polaires. C’est là qu’habitent les ours polaires, que l’on retrouve par conséquent aussi dans l’archipel des Svalbard. Selon les estimations actuelles, 3'500 ours polaires peuplent les îles du Svalbard. Dans notre guide nautique pour le Svalbard, il est écrit: «As soon as you arrive in Svalbard, you are no longer on the top of the food chain.» Déjà lors de nos démarches pour obtenir l’autorisation de voyage (cf. Cruising juillet/août 4-2017), nous avons dû prouver au Sysselmann (Governor of Svalbard) que nous allions voyager avec des armes.

 

Notre matériel pour se protéger contre les ours polaires comportait:

  • Deux Mauser M-98 gros calibre avec des balles à blanc et des balles réelles
  • Deux pistolets de détresse de calibre 4 avec des cartouches de détresse et des cartouches détonantes
  • Un Ocean Signal Personal Locator Beacon (PLB)
  • Deux radios portatives VHF
  • Un canot pneumatique (comme dinghy de rechange) avec rame et pompe
  • Six feux à main de détresse
  • Des protections auditives sous forme de bouchons d’oreilles
  • Des couvertures thermiques / bivouacs
  • Un téléphone portable Iridium
  • Une pharmacie de secours
  • Des thermos avec boisson chaude

 

A notre arrivée à Hornsund, nous avons longuement discuté de notre dispositif de sécurité pour les sorties à terre, et tous les membres d’équipage se sont exercés au tir réel avec les armes à feu.

 

Equipés pour une sortie à terre

Nous avons fixé comme principe que le groupe reste toujours ensemble lors d’une sortie à terre. Les deux Mauser M-98 et les pistolets de détresse étaient répartis entre quatre personnes. Cela permettait une utilisation rapide et sûre des armes, sans pour autant devoir s’encombrer d’une charge double. Lors d’une éventuelle attaque d’ours, l’objectif est de faire fuir l’animal en tirant un à deux coups de pistolet de détresse, sans que celui-ci attaque (placement de la cartouche à mi-distance entre les personnes et l’ours). Les armes à feu et pistolets de détresse étaient disponibles à double, car notre groupe se séparait – ou devait se séparer – souvent en deux (places disponibles sur le dinghy). Cela garantissait que chaque groupe pouvait se défendre de manière autonome. Etant donné que les ours polaires peuvent nager, les équipiers qui restaient à bord du Cruising Swiss V devaient eux aussi être en mesure de se défendre en tout temps. En outre, on devait à tout moment être en mesure d’établir un contact par radio VFH entre le bateau et/ou entre les groupes. Pour ce faire, nous avons sélectionné le canal 77 et avons réglé en conséquence les deux appareils portables ainsi que la radio du bateau. Le téléphone portable Iridium accompagnait l’équipage à terre au cas où tous les navigateurs quittaient le navire, et restait sinon à bord du Cruising Swiss V – la même chose valait pour le dinghy gonflable. Au cas où celui-ci était emporté à terre, il était déposé à un endroit qu’un ours pouvait difficilement atteindre (cabane, sous un bateau, etc.). En outre, chaque navigateur disposait d’un feu à main de détresse comme «dernier» moyen de défense. Les ours polaires craignent en effet les sifflements et les lumières fortes provoqués par les fusées ou les cartouches de détresse.

 

Sandra Thöndel et Andreas Flückiger ont procuré à tout l’équipage un sentiment de sécurité en garantissant la sécurité médicale et en donnant toutes les informations utiles en matière de sécurité. Leur contribution a été d’une valeur inestimable, et je leur en suis très reconnaissant.

 

Ny-Ålesund et les glaciers
Environ deux tiers de la surface du Svalbard sont recouverts de glaciers. L’un des temps forts de notre voyage a été notre arrivée dans le village habité toute l’année le plus septentrional au monde (Ny-Ålesund, à environ 79° nord). Nous avons eu droit à un temps ensoleillé et estival durant deux jours, ce qui nous a permis de profiter pleinement des glaciers de la région.

 

Ravitaillement et veille
Sur recommandation de Richard De Moliner, nous avons accueilli Josef Eberle au sein de notre équipage lors de cette croisière. Josef avait l’immense responsabilité de préparer et d’assurer le ravitaillement pour ces trois semaines. Grâce à sa grande expérience, il a accompli sa tâche de manière autonome et extrêmement fiable. Josef occupait une place particulière dans le système de veille (que nous avons suivi tout au long des trois semaines), avec une répartition fixe d’une veille par jour. Le reste du temps, il veillait à ce que nous ayons au minimum deux repas chauds en l’espace de 24 heures. Le plan de veille était conçu de sorte que tout le monde puisse autant que possible manger ensemble. Le principe de base était que deux personnes veillent en même temps. Chaque navigateur était remplacé après trois heures, et la relève était organisée de sorte qu’un changement avait lieu chaque heure et demie. Ce système nous a permis de nous transmettre en continu les informations sur les conditions actuelles et de maintenir un maximum de diversité dans la composition de la veille.
Pratiquement tous les achats ont été accomplis en une fois avant le début de la croisière à Trondheim. Le ravitaillement a été organisé de sorte que nous puissions toujours avoir une alimentation équilibrée avec suffisamment d’énergie, de protéines et de fibres. Le plan de veille et le ravitaillement ont été menés à bien grâce aux prouesses de Richard et Josef.

 

Un grand merci

L’idée de voyager dans l’archipel du Svalbard avec le CCS remonte déjà à plusieurs années. La planification qui a commencé en 2015 a rendu possible ce projet et a permis de programmer un voyage pour 2017. Le Cruising Swiss V a désormais atteint le Svalbard, et les préparatifs intensifs et minutieux en valaient la chandelle.
 
L’équipage de la croisière 04/2017/26 remercie chaleureusement le Cruising Club de Suisse et tout particulièrement le groupe directeur d’avoir mis à notre disposition le Cruising Swiss V et de nous avoir fait confiance pour naviguer à son bord jusqu’au Grand Nord. Nous avons ainsi pu étendre la zone de croisières de notre club jusqu’aux régions polaires.

 

Nous remercions également le Sysselmann, qui a fait confiance au CCS ainsi qu’à nous-mêmes, et qui nous a permis de vivre cette nouvelle expérience dans le nord.

 

Je souhaite au CCS qu’il continue d’avoir à l’avenir la volonté, le courage et la diligence pour lancer et mener avec succès des projets qui sortent de l’ordinaire. Ça en vaut la peine!

 

Patrick Weibel

 

 

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Die Cruising Swiss V unter dem neuen rollbaren Gennaker im Hornsund

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Lebensmittelaufbewahrung für Unterwegs, nach dem Einkauf in Trondheim

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